
Julien Mucchielli, le chroniqueur 2.0

Julien Mucchielli, journaliste indépendant, Photo : CM
Jeune chroniqueur judiciaire indépendant, Julien Mucchielli a acquis sa notoriété dans le métier grâce à ses live tweets. Ce passionné de justice arpente les tribunaux et multiplie les projets, confiant en l'avenir de sa profession, qui a encore de nombreuses richesses à offrir.
«Il faut être pédagogue, le plus simple possible. Plus la matière est difficile et plus l'écriture doit être simple. Plus les faits sont sordides et durs, plus l'écriture doit être sobre ». Pour Julien Mucchielli, chroniqueur judiciaire indépendant, son métier pose la problématique inverse des autres exercices journalistiques. « On a toutes les informations, mais il faut faire un tri énorme. Choisir le bon ton, le bon angle et le bon rythme pour retranscrire l'ambiance du tribunal le mieux possible », explique le journaliste.
Après le bac, Julien Mucchielli s'inscrit en faculté de droit, à l'université Paris1-Panthéon Sorbonne. Pas par amour du droit. Mais pour concilier une formation qui lui permettra de trouver du travail avec un enseignement intellectuel enrichissant. Il valide péniblement un Master 1 en Droit public. « C'était chaotique, j'ai redoublé plusieurs fois, je n'étais pas très sérieux car je ne me voyais pas faire un métier dans le Droit », se rappelle le journaliste de 30 ans.
Mordu d'actualité, il passe beaucoup de temps à lire la presse. Adieu la sécurité de l'emploi, il décide de passer les concours d'entrée aux écoles de journalisme. « C'est un métier sinistré, vous n'y arriverez jamais ». Il se remémore les mots de François Lenglet qui lui a obtenu son premier stage à La Tribune. Il finit par intégrer le Centre de formation des journalistes (CFJ).
« Et après, rien. Un trou noir »
Le chemin de la chronique judiciaire se trace avec évidence. « Je lis Pascale Robert-Diard depuis mes 16 ans, à l'époque où ma mère m'abonne au Monde.fr », explique le jeune homme brun aux yeux marron. Sa première expérience, les comparutions immédiates. Il suit les pas de son autre modèle, Dominique Simonnot. « J'ai essayé d'adopter un ton similaire au sien, tranchant, qui montre la vérité crue de la comparution immédiate. D'abord on travaille par mimétisme, après on développe son propre style », raconte-t-il de sa voix rauque.
Le CFJ lui offre des opportunités de stage. Il passe un été à la Provence à Cavaillon en presse quotidienne régionale. Une expérience qui lui permet de pousser la porte des tribunaux de province. Puis direction Le Monde. Il rencontre Pascale Robert-Diard et écrit quelques comptes-rendus d'audience. Il fait ensuite un stage à Rue 89, pendant deux mois où il est plus polyvalent.
« Et après, rien. Un trou noir, une sorte de flemme et de découragement devant le marché du travail », confie le journaliste indépendant. Pas de débouchés dans les journaux où il a fait des stages, des CV envoyés un peu partout. Des opportunités qui n'aboutissent pas.
Mais Julien Mucchielli persévère. En décembre 2013, il commence à piger pour le quotidien juridique Dalloz actualités, de façon régulière. La même année, il rejoint les plumes du site Epris de justice où il va pouvoir faire ses armes. « Je me suis vraiment fait plaisir. C'était à la fois une vitrine et une façon de s'entrainer à l'écriture, engranger de l'expérience. Il faut faire différents types de procès : comparutions immédiates, assises, correctionnelle financière, politique, du crime de sang, du terrorisme, du banditisme, l'écriture n'est pas la même, les difficultés non plus », résume le journaliste.
Made in Twitter
A l'audience, Julien Mucchielli prend des notes à la main. S'il a une bonne mémoire pour les images qu'il n'écrit pas, en revanche il note les dialogues importants au mot près. « Ils donnent de la vie au papier », précise le journaliste. « Je préfère écrire le lendemain matin, je suis plus en forme et ça me permet de prendre du recul par rapport à l'audience, d'avoir les idées claires », continue le jeune homme.
Aujourd'hui il signe des chroniques dans la revue Sang Froid, spécialisée dans la justice et les polars, 75, une revue parisienne ou encore Street Press. Tout en ayant d'autres projets. « Une fois qu'on a une spécialité et qu'on est un peu connu, il suffit d'avoir des idées et de les proposer », explique Julien Mucchielli.
Sa notoriété, il l'a gagnée sur Twitter. « J'ai créé un compte quand j'étais au CFJ. J'ai commencé à faire des live-tweet. Ca a pris tout de suite. Très vite, j'étais à 6 000 followers, ça m'a donné de la crédibilité », se rappelle-t-il. Le live-tweet est l'occasion de faire partager « un moment d'audience, une punchline, un aveu », mais lui permet aussi d'annoncer son article et lui offre de la visibilité. « Je live-tweet dans les moments de creux, quand je m'ennuie un peu. Je reprends mes notes pour écrire mes tweets », confie Julien Mucchielli. Twitter lui permet d'être suivi, retweeté, et même insulté : « Quand je me fais critiquer par les deux parties ça prouve que mon travail est équilibré », s'amuse-t-il.
Très à l'aise avec l'écriture ça ne l'empêche pas de rêver d'autres formats. Il travaille sur un projet de chroniques radio de 5 minutes. Et pourquoi pas « une offre multimédia avec des prises de son et des images pour raconter ce qui se passe autour d'un procès. Les gens qui se demandent si l'accusé est coupable. L'avocat qui vient de se prendre un coup dur en interrogatoire et fume sa clope nerveusement en se demandant comment rattraper le coup. Ou encore la partie civile et la défense qui, après s'être écharpées à l'audience, discutent autour d'un café. Il faudrait arriver à capter toutes ces choses et les retranscrire », imagine Julien Mucchielli.